C’était la folle rumeur du jour. Depuis cette nuit, beaucoup de sources s’accordaient à dire que l’ESA (Entertainment Software Association), l’organisme en charge de l’organisation de l’E3, était sur le point d’annoncer l’annulation pure et simple de l’E3 2020 en raison de l’épidémie de coronavirus. Beaucoup de joueurs semblaient surpris voire choqués par cette nouvelle. Le fait que ce même organisme assurait il y a quelques jours encore continuer à travailler activement sur le déroulement de l’événement, et ce afin de le maintenir et de faire en sorte qu’il se passe dans les meilleures conditions possibles, n’a probablement pas dû aider. Mais peut-on réellement être surpris face à cette annonce ?

Une annulation inévitable

Personnellement, je considère que c’est loin d’être une surprise. C’était même on ne peut plus prévisible depuis un bon moment déjà, quoi qu’en dise l’ESA avec ses communiqués se voulant rassurants. De multiples gros événements ont été annulés et/ou reportés ces dernières semaines, il n’y avait donc aucune raison que l’E3 passe à travers les mailles du filet. Je ne m’attendais en aucun cas à un report non plus puisqu’un événement de cette ampleur doit nécessairement se préparer à l’avance. Cela nécessite une organisation aussi compliquée que monstrueuse, et c’est d’ailleurs pour cela que les dates sont toujours connues un an à l’avance. La préparation commence bien plus tôt qu’on ne l’imagine. En revanche, je dois l’avouer, j’ai été surpris de voir l’annulation survenir aussi tôt. J’aurais plutôt cru qu’ils retarderaient au maximum l’échéance, au moins jusqu’à mai, dans l’éventualité où la situation évoluerait favorablement.

Une année 2020 sans « Noël des gamers »

Évidemment, comme énormément de joueurs à travers le monde, je suis profondément attristé par cette nouvelle. Nous annoncer l’annulation de l’E3, c’est comme nous annoncer qu’on ne fêtera pas Noël cette année. Cela ne fait que deux/trois ans que je peux suivre assidument cet événement de mon côté mais j’y ai très rapidement pris goût. À tel point que c’est désormais l’événement que j’attends avec la plus grande impatience chaque année, car il s’agit sans le moindre doute du plus excitant qui existe à l’heure actuelle dans l’industrie du jeu vidéo.

L’E3, et même la période qui le précède, c’est tout simplement le moment où l’on retrouve tous notre âme d’enfant le soir de Noël. C’est d’ailleurs pour ça que j’aime le qualifier de « Noël des gamers ». On est tous extrêmement excités de savoir ce qui nous attend, de savoir ce que les éditeurs et les constructeurs vont nous offrir à cette occasion. Ainsi, on se met à spéculer, à analyser, à discuter… à rêver, même. On sait parfois que nos attentes sont complètement irréalistes mais n’est-ce pas bon de laisser son imagination s’envoler de temps à autres, tout en gardant dans un coin de notre esprit les pieds sur Terre malgré tout ? Je suis persuadé que si.

Il n’y a que l’E3 qui parvient à provoquer des moments aussi incroyables…

Plus encore, l’E3 c’est aussi la représentation de multiples jours de communion et de rassemblement pour les joueurs du monde entier. C’est toujours un moment très convivial, très bonne ambiance. On vit les choses à fond tous ensemble et on partage de ce fait notre bonheur. Dans le fond, je pense que si cette nouvelle nous attriste autant, c’est parce qu’on a tous définitivement pris conscience que cet aspect-là de l’événement va nous être retiré. Vivre une telle chose va cruellement nous manquer à tous, encore plus quand on sait que cette année était censée être celle de la nouvelle génération, et donc d’une édition, probablement, d’anthologie.

Faut-il réellement s’inquiéter pour la suite ?

Néanmoins, en y réfléchissant bien et en prenant un peu de recul, je pense qu’il est intéressant de relativiser la chose. Bien sûr, comme tout le monde, je préférerais continuer à vivre mon E3 tel qu’on l’a toujours connu. Je préférerais rester éveiller tard la nuit pour suivre des conférences humaines, menées en direct, tout en échangeant sur les réseaux sociaux à chaque chose qui se produit. À une époque où la légitimité d’un tel événement tend de plus en plus à être remise en question, par le public comme par l’industrie, j’ai évidemment peur des conséquences dramatiques qu’une année sans E3 pourrait impliquer pour l’avenir.

Mais posons-nous quand même la question suivante : et si au fond, cela avait des conséquences bénéfiques ? À l’heure où j’écris ces mots, l’ESA a annoncé être en train de voir s’il serait possible de maintenir l’événement sous un format entièrement digital, avec des conférences qui seraient donc éventuellement faites à huit clos ou, dans le pire des cas, préparées à l’avance. Phil Spencer, le PDG d’Xbox, a d’ailleurs déjà annoncé que c’est ce qu’il comptait faire de son côté. À mon sens, il ne fait aucun doute que les autres éditeurs et constructeurs devraient rapidement lui emboîter le pas. Ce n’est qu’une question de temps.

L’E3 a toujours été un moment important pour la Team Xbox. Compte tenu de cette décision, nous célébrerons cette année la nouvelle génération du gaming avec la communauté Xbox et tous ceux qui aiment jouer via un événement digital Xbox. Plus de détails seront communiqués dans les prochaines semaines.

Alors certes, l’impact ne sera définitivement pas le même. Le plaisir que l’on ressentira n’aura assurément pas la même saveur. Pourtant, je reste persuadé que fondamentalement, cela ne nuira en aucun cas à la hype que l’on peut ressentir et éprouver, à condition bien sûr que les choses soient faites dans les règles de l’art. L’avantage d’avoir annoncé l’annulation aussi tôt est que tous ont maintenant suffisamment de temps devant eux pour rebondir et préparer leur temps de communication pour les mois à venir, probablement aux dates initialement prévues pour l’E3. Comment je le sais ? Parce que quoi qu’on en dise, si le contenu y est, il n’y aucune raison que l’excitation ne suive pas de notre côté.

Il suffit de voir les rassemblements que parviennent à provoquer les Nintendo Direct lorsqu’ils sont annoncés, ou même la hype que sont parvenus à susciter les State of Play nous ayant présenté un simple trailer pour The Last of Us Part II et Resident Evil 3. Dans l’idéal, il serait évidemment préférable que de tels formats ne soient pas privilégies en remplacement de l’E3. J’espère qu’ils chercheront à aller un peu plus loin. Mais on sait ce qui nous attend dans le pire des cas, ce qui est d’une certaine manière assez rassurant. Jason Schreier nous a annoncé que Warner Bros. Games devait (comme par hasard) participer pour la première fois à l’événement et y annoncer le nouveau Batman, le fameux jeu Harry Potter ainsi que le nouveau projet de Rocksteady. Je ne sais pas vous mais personnellement, quelle que soit la manière dont c’est présenté, je sais que la hype sera au rendez-vous. Pas forcément de la même façon, mais elle le sera.

> Retrouvez ma critique de Batman Arkham Knight

La fin de l’E3 en approche ?

J’irai même un peu plus loin en réagissant à ce que certains craignent d’ores et déjà depuis un moment maintenant, à savoir la disparition de l’E3. Pour certaines personnes, zapper l’E3 quand on connaît le climat qui règne à son sujet depuis quelques temps, c’est prendre le risque que cet événement disparaisse purement et simplement de l’horizon à compter de l’année prochaine. Je n’irai pas jusqu’à dire que c’est impossible car je n’en sais rien. Mais à mon sens, il reste très peu probable que cela arrive. Ce n’est pas parce que l’E3 risque de se faire sous format entièrement digital le temps d’une année que cela est amené à durer.

La raison à cela est simple. Beaucoup semblent oublier que l’E3, ce n’est pas seulement des conférences. Pour nous qui sommes à des milliers de kilomètres de l’événement, ça l’est peut-être. Mais l’E3 c’est aussi et surtout un salon dédié aux professionnels et, depuis plusieurs années, au public. Ce sont des milliers de personnes qui se déplacent pour aller à la rencontre les uns des autres, pour échanger, pour mettre en place des projets ou, dans le cas du public, pour avoir l’occasion de tester un grand nombre de jeux en avant-première. Supprimer l’E3 sous prétexte qu’organiser des conférences en format vidéo coûterait moins cher et serait bénéfique à l’environnement, ce serait aussi supprimer cet aspect-là. Or, j’imagine que ce n’est le but de personne.

E3C’est donc à cet effet que l’année 2020 va, bien malgré elle, marquer un tournant décisif pour l’événement. Cela va être l’occasion pour les organisateurs comme pour les professionnels de tester de nouveaux moyens de communication, de voir s’il est possible d’organiser les choses autrement, sans justement avoir à se préoccuper en parallèle de tout le côté salon. Il s’agira en quelques sortes d’une année test qui, j’en suis persuadé, amènera par la suite de gros changements dans la mise en place complète de l’événement. Mais le changement, bien qu’il fasse toujours très peur, n’est pas foncièrement une mauvaise chose. C’est un fait, beaucoup s’accordent à dire que l’E3 perd de sa splendeur voire même de son intérêt depuis quelques temps. Cette pause forcée va ainsi leur permettre de se réinventer et de revenir, je l’espère, plus forts dès l’année prochaine.

Pour bien faire comprendre la façon dont je vois les choses, je vais me permettre de faire une petite analogie de la situation avec le développement d’un jeu. Prenons le cas Ubisoft avec la licence Assassin’s Creed. Entre 2009 et 2015, le studio a sorti un nouvel opus chaque année, sans essayer de prendre du recul et de faire évoluer sa formule. Après tout, celle-ci fonctionnait auprès du public. Pourtant, le fait qu’elle fonctionne n’a pas empêché les joueurs de soulever le manque de renouvellement des jeux, qui ne coïncidaient plus forcément à leurs attentes à mesure que le temps passait. Suite à cela, les équipes de développement ont pris un an de pause et sont revenus avec un Assassin’s Creed totalement remanié en 2017, à savoir Assassin’s Creed Origins, qui a alors beaucoup plus au public. De cette manière, on peut imaginer que l’E3 est en réalité dans la même situation en ce moment. Cette année de pause forcée va les pousser à se remettre en question, à se réinventer et à faire évoluer l’organisation de l’événement pour qu’elle corresponde davantage aux évolutions de la société, du public et des professionnels.

> Retrouvez ma critique d’Assassin’s Creed Origins

En ce sens, se laisser aller à des raccourcis pour affirmer que l’E3 va disparaître au profit d’un format entièrement digital dès l’an prochain me semble largement exagéré. À mes yeux, c’est une évidence, l’E3 2021 ne prendra pas forcément la même forme que les derniers E3 que l’on a pu vivre. Je pense que l’on doit s’attendre à de gros bouleversements pour tout ce qui concerne la partie communication de l’événement, qui est indubitablement amenée à évoluer. En revanche, je suis persuadé que le salon en lui-même, tout en n’étant lui non plus pas à l’abri de voir sa forme évoluer, va demeurer. Tout simplement parce que le faire disparaître serait pour le coup réellement dramatique. Cela pourrait revenir à priver un grand nombre d’entités d’une visibilité et d’une mise en avant qu’elles n’ont peut-être pas forcément le reste de l’année, faute de moyens. Pire encore, cela reviendrait à priver l’industrie du jeu vidéo de son plus gros salon uniquement parce que les moyens de communication ont évolué et que l’ESA a été incapable de s’y adapter. Ce serait donc un véritable échec.

Rendez-vous en 2021

En résumé : attendons avant de paniquer ! Il est entièrement normal d’être déçu de voir cet événement si cher à notre cœur être annulé alors qu’il est en place depuis plus de 20 ans déjà. Il est entièrement normal d’avoir peur de ce qui va bien pouvoir se passer par la suite car on se dirige plus ou moins vers l’inconnu. Et tout le monde le sait, l’inconnu fait peur. Néanmoins, cela ne veut pas dire que quelque chose de mauvaise augure approche pour autant. Beaucoup d’entre vous le répétez probablement chaque année, la société évolue, les méthodes de communication changent et il fallait tôt ou tard que cela ait un impact. Dans le cas présent, le coronavirus ou encore les doutes de plus en plus visibles de certains constructeurs et éditeurs, Sony en tête de liste, y sont probablement pour beaucoup. Mais il faut se dire que cette pause forcée a de grandes chances d’avoir des conséquences bénéfiques, si ce n’est plus de chances que d’avoir des conséquences réellement négatives.

Je conclurai cet article en citant les mots de l’ESA, qui a profité de son communiqué d’annulation pour commencer à évoquer l’E3 2021 en affirmant qu’il s’agira d’un « événement réimaginé qui rassemble les fans, les médias et l’industrie dans un showcase qui célèbre l’industrie mondiale du jeu vidéo. » C’est bien la preuve qu’ils envisagent un futur pour l’événement et qu’ils réfléchissent dès maintenant à ce qu’ils pourront être en mesure de faire sur le long terme pour lui redonner un coup de boost. Mais avant, ne perdons tout de même pas de vue « l’E3 2020 » qui, certes, sera très différent et peut-être beaucoup moins excitant pour certains, mais qui aura malgré tout de très belles choses à nous proposer, j’en suis convaincu.

E3 2020
See you next year… cette fois pour de vrai, on l’espère !

 

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