Disponible depuis novembre 2020, la PlayStation 5 a déjà eu l’occasion d’accueillir un certain nombre de productions first-party. Mais le 30 avril dernier, la dernière-née des consoles de Sony a accueilli sa première véritable grosse exclusivité sous les couleurs de Returnal. Développé par le studio finlandais Housemarque, le jeu qui se présente comme un TPS roguelike arrive ainsi avec la lourde tâche de marquer, pour de bon cette fois, le coup d’envoi de la nouvelle génération de PlayStation. Un objectif difficile pour une production atypique au sein du catalogue de l’éditeur, qui continue de nous surprendre par ses prises de risques.

Test réalisé sur PS5 grâce à un code fourni par l’éditeur

« Tu as vu l’Ombre Blanche ? »

Briser le cycle. Voilà une expression qui illustre aussi bien le titre d’Housemarque que la démarche de Sony, qui ne cesse depuis plusieurs années de vouloir proposer toujours plus de nouvelles expériences à son public. Après des œuvres comme Horizon Zero Dawn, Ghost of Tsushima ou encore Death Stranding, l’éditeur nous emmène une nouvelle fois dans un univers complètement différent. Dans Returnal, nous incarnons Selene Vassos, une employée du commandement Astra dont le vaisseau s’est crashé sur la planète extraterrestre Atropos. Luttant pour sa survie, celle-ci réalise alors qu’elle est prise dans une boucle temporelle : chacune de ses morts la ramène au point de départ, à savoir le crash. Son objectif, à chaque nouvel échec, est donc de comprendre comment briser ce cycle. Et pour se faire, elle n’a d’autre choix que de s’aventurer dans les terres de cette étrange planète afin de percer les secrets d’une mystérieuse « Ombre Blanche », raison de sa présence ici.

Voilà qui résume globalement l’histoire du jeu qui, il est bon de le préciser, ne s’inscrit pas forcément dans la continuité des productions de PlayStation en termes de narration. En effet, le cœur de Returnal se situe avant tout dans son gameplay plutôt que dans son scénario, qui se trouve de ce fait plutôt en retrait tout au long de l’expérience. En dehors de quelques rares cinématiques, les contours de l’histoire passent essentiellement par des journaux de reconnaissance trouvés sur d’anciens cadavres de Selene ainsi que sur des xénoglyphes, qui sont des sortes de tablettes extraterrestres à déchiffrer en mettant la main sur des fragments xénolexicaux. Pour autant, cela ne veut pas dire qu’il ne s’agit pas d’un aspect essentiel de l’aventure, bien au contraire. Tout est fait pour attiser la curiosité du joueur et pour le pousser à déchiffrer de lui-même les différents éléments disséminés sur son chemin afin de comprendre les tenants et les aboutissants de cette aventure.

Et autant vous le dire tout de suite, c’est loin d’être une tâche aisée. Les œuvres de science-fiction sont rarement réputées pour être les plus accessibles, et Returnal n’échappe absolument pas à cette règle. Cryptique du début à la fin, l’histoire de Selene et de la planète Atropos recèle de mystères qui, même une fois l’aventure arrivée à son terme, restent difficiles à interpréter, encore plus si nous n’avons pas réussi à mettre la main sur tous les éléments nécessaires en cours de route. C’est d’ailleurs là l’une des particularités du titre d’Housemarque : l’histoire ne se raconte pas au joueur, c’est à ce dernier d’aller la chercher. D’une certaine manière, le studio nous pousse donc littéralement à entreprendre la même démarche que Selene pour comprendre les événements. Un point qui en rebutera inévitablement certains, mais qui en motivera sans doute d’autres à explorer sans relâche les lieux, en particulier pour réussir à obtenir la véritable fin.

Un jour sans fin

Toutefois, comme cela a déjà pu être précisé, le cœur du jeu ne se situe pas dans sa narration mais dans son gameplay. Et sur ce point, il convient bien d’insister sur le fait que Returnal ne peut se résumer à un simple jeu de tir à la troisième personne : ce serait négliger la composante roguelike de son approche, qui a une influence capitale sur le style d’expérience qu’il propose. C’est même à ce niveau-là que s’illustre plus spécifiquement la notion de boucle temporelle puisque le joueur lui-même en est tout autant victime que Selene au cours de sa partie. Peu importe son niveau de progression, mourir implique obligatoirement de revenir à la case départ et de devoir tout recommencer, en plus de perdre l’ensemble de l’équipement et des améliorations que l’on a pu récupérer en chemin (à l’exception de quelques très rares éléments liés au scénario). Vous l’aurez compris donc, le titre d’Housemarque peut facilement décourager en cas de mort répétée.

Des raccourcis sont disponibles pour passer d’un biome à l’autre

C’est en effet un jeu qui nécessite un certain investissement de la part du joueur, d’autant plus qu’il n’y a aucun système de sauvegarde embarqué. Un point compréhensible vis-à-vis du concept, mais qui montre toutefois ses limites lorsqu’il impose de ne pas éteindre sa console en cas de départ sous peine de devoir injustement repartir du début. À ce sujet, précisons tout de même que cet aspect est bien moins impressionnant qu’il n’en a l’air sur le papier : pour éviter de rendre l’expérience trop fastidieuse, Returnal propose quelques « checkpoints » à chaque objectif majeur accompli qui, par la suite, ne sera ainsi plus à refaire. Par exemple, une fois un boss vaincu, vous n’aurez pas à le réaffronter en cas d’échec ultérieur. En revanche, peu importe le biome dans lequel vous vous trouvez au moment de votre mort, vous devrez toujours repartir depuis le vaisseau en bénéficiant de quelques raccourcis pour retourner plus rapidement à votre objectif.

La progression a d’ailleurs été pensée de manière intelligente puisqu’à votre retour dans le biome concerné, vous bénéficierez automatiquement d’une mise à niveau et d’un bonus de soin à utiliser (ou à conserver) en cas de besoin. Autre élément important à savoir : l’univers du jeu a été conçu de manière procédurale, ce qui signifie que la construction de l’environnement est amenée à changer à chacune de vos morts. En d’autres termes, si vous traverserez toujours les mêmes boucles de salles, celles-ci ne réapparaîtront jamais dans le même ordre et vous n’y accéderez pas forcément par le même point d’entrée qu’auparavant. Cela aura évidemment pour conséquence de vous dérouter au début mais plus vous mourrez, plus vous aurez tendance à prendre vos marques malgré cet aspect. En revanche, l’apparition des ennemis et du loot variera constamment de sorte que finalement, vous n’aurez jamais totalement le contrôle sur le monde qui vous entoure.

Cela n’empêche cependant pas d’avoir une totale liberté sur l’approche que l’on désire adopter pour notre progression. Si un objectif est clairement défini à chaque fois, le titre d’Housemarque ne cherche jamais à nous prendre par la main et à nous diriger en nous imposant d’aller à un endroit plutôt qu’à un autre. Bien sûr, la construction de l’aventure reste majoritairement linéaire, il ne s’agit pas d’un monde ouvert, mais les environnements regorgent de lieux bonus à explorer pour espérer mettre la main sur du loot ou des récompenses supplémentaires. Par ailleurs, on distingue parfois un léger côté metroidvania puisque des endroits peuvent être inaccessibles lors de notre premier passage, mais le devenir ultérieurement si l’on arrive à mettre la main sur les outils nécessaires. Les translocateurs disposés un partout sont alors d’une grande aide pour se téléporter, sans temps de chargement, à n’importe quel endroit du biome où l’on se trouve, et ce à tout moment.

Risque calculé

C’est là qu’entre en jeu la notion d’exploration et l’idée de « risque calculé » qui en découle. En effet, comme tout bon roguelike, Returnal se présente comme un jeu extrêmement exigeant. La mort fait partie de l’expérience et peut survenir à n’importe quel moment en raison des ennemis aussi nombreux que puissants qui croisent notre route à chaque nouvelle porte franchie. L’idée est donc, tout en se dirigeant vers son objectif, d’oser explorer le monde qui nous entoure, et en particulier les salles bonus mentionnées quelques lignes plus haut, afin de réussir à mettre la main sur un équipement toujours plus puissant et développé. Mais cela ne se fait pas sans risque et dévier de sa trajectoire peut parfois nous conduire à une mort aussi frustrante qu’inattendue, qui nous oblige alors à tout recommencer depuis le début. Néanmoins, c’est aussi cela qui fait tout le sel d’un jeu tel que celui-ci : le goût du risque est, certes, à double tranchant, mais il est parfois inévitable si on veut parvenir à mieux s’en sortir par la suite.

Certaines salles bonus peuvent rapporter gros… mais aussi risquer gros

C’est d’autant plus important que le côté procédural de l’expérience se répercute évidemment sur le loot, qui est entièrement aléatoire. D’une partie à une autre, vous ne tomberez pas sur les mêmes équipements ni les mêmes ressources, ce qui peut rendre votre progression plus ou moins compliquée – mais pas forcément impossible – selon votre niveau de chance. C’est toutefois un moyen de tenter de nombreuses approches différentes et de trouver celle qui vous convient le mieux, ou pour être plus précis, celle qui vous réussit le mieux. Car par-delà les ressources récurrences (le silphium pour récupérer/augmenter sa vie, l’obolithe pour acheter des bonus ou encore l’éther pour débloquer de nouveaux atouts), c’est surtout vers des ressources beaucoup plus rares telles que les consommables, les reliques, les parasites et bien sûr les armes qu’il faudra se tourner pour mettre toutes les chances de son côté.

La notion de risque calculé prend tout son sens avec les parasites et les objets nocifs

Mais parfois, les choses ne sont pas si simples. Il faut absolument peser le pour et le contre avant de ramasser quoi que ce soit, sous peine de voir la suite de son cycle être handicapée de manière plus ou moins permanente. Car en effet, si certains bonus comme les reliques auront des effets positifs sur nos statistiques, d’autres comme les parasites ou les objets nocifs s’accompagneront également d’effets négatifs. Par exemple, s’équiper d’un parasite pourra nous octroyer +10% de protection mais nous infliger des dégâts de chute en contrepartie. Prendre le risque de ramasser un objet nocif pourra nous donner accès à un bonus de taille, mais également provoquer un dysfonctionnement pénalisant à résoudre ensuite. Par exemple : ne plus pouvoir ramasser d’arme avant d’avoir rempli la condition demandée, ou d’avoir un consommable capable de réparer la tenue de Selene. En résumé, Returnal est donc un jeu très exigeant teinté d’une certaine dose de stratégie.

Combats à mort

Pour autant, même en y mettant toute la volonté du monde, il convient de garder en tête que le cœur même de l’expérience repose sur les combats qui, eux, ne font jamais le moindre cadeau au joueur. Composé d’un bestiaire extrêmement fourni et diversifié, le titre d’Housemarque nous confronte à des hordes d’ennemis tous plus agressifs les uns que les autres, dans des affrontements toujours plus dynamiques et viscéraux où la moindre petite erreur peut avoir de lourdes conséquences. D’où l’intérêt de ne pas négliger la partie exploration pour être certain d’avoir la meilleure arme avec de bonnes statistiques en sa possession, même si cela ne suffira pas toujours. Dans son approche, Returnal se rapproche d’ailleurs beaucoup d’un jeu comme Control, que ce soit en termes de prise en main ou en termes de gameplay.

Ainsi, chaque arme trouvée possède des statistiques et attributs définis aléatoirement qui affectent son fonctionnement selon plusieurs critères. Toutes sont également équipées d’un tir secondaire, lui aussi déterminé de façon aléatoire, et possèdent des munitions illimitées. Pour compenser, un niveau de surchauffe est alors présent et implique de devoir attendre plusieurs secondes en cas d’utilisation répétée. Cela peut toutefois être évité grâce au système de surcharge, similaire à ce que l’on trouve dans Gears of War, qui permet de réduire ce délai en appuyant sur R2 dans un timing bien précis. À noter qu’il y a aussi la présence d’un système d’adrénaline, qui peut augmenter jusqu’à cinq niveaux pour chaque ennemi tué sans subir de dégâts. Chacun octroie alors un bonus supplémentaire, qui sera néanmoins réinitialisé à l’instant même où Selene recevra un coup.

Un univers incroyablement immersif

Les combats du titre sont donc particulièrement intenses et nécessitent d’être en mouvement perpétuel, non seulement pour éviter les très nombreux projectiles envoyés par les ennemis mais aussi pour éviter qu’ils ne s’approchent de trop afin de nous infliger de dévastatrices attaques au corps-à-corps. Sur ce point, le jeu s’en sort même avec les honneurs grâce à une prise en main qui se veut à la fois fluide, agréable et instantanée. Cependant, là où Returnal excelle davantage encore, c’est sur sa manière de nous immerger dans son univers à tous les niveaux. La DualSense est par exemple constamment mise à contribution afin que l’expérience soit littéralement vécue, manette en mains, par le joueur. Le tir secondaire de l’arme passera notamment par la gâchette adaptative L2, qu’il faudra enfoncer plus profondément qu’en phase de tir traditionnel pour l’activer, tandis que des vibrations se feront régulièrement ressentir en fonction de ce qui se passe à l’écran.

Housemarque a également fait en sorte de beaucoup jouer sur les sons afin que l’on puisse, sans même prêter attention à l’ATH, comprendre ce qui se passe et agir en conséquence. La disponibilité du tir secondaire après une phase de rechargement, la récolte de ressources voire même de simples petits bruits ambiants sortent ainsi de la manette et peuvent nous communiquer des informations cruciales dans le feu de l’action. Plus encore, tous ceux désirant vivre l’aventure au casque peuvent pleinement profiter de la spatialisation audio 3D du titre, qui permet alors de déterminer avec précision où se trouvent les ennemis et d’où viennent les projectiles qui s’approchent de nous. Pour les autres, la mini-map située en bas à droite de l’écran pourra être d’une grande aide grâce à sa clarté, qui permet de voir en un seul coup d’œil où se trouvent les ennemis par rapport à nous mais également où sont situées les diverses ressources présentes dans la zone.

Toujours côté audio, le titre n’est pas non plus en reste lorsqu’il s’agit de sa bande-son. Composée par Bobby Krlic, cette dernière sait se montrer discrète mais néanmoins audible pour nous accompagner dans nos phases d’exploration tandis qu’elle gagne largement en puissance et en énergie durant les affrontements les plus musclés. Enfin, pour compléter un tableau déjà bien rempli, Returnal ne manque pas de nous plonger dans un monde à l’identité visuelle extrêmement atypique et séduisante, qui varie les ambiances à la perfection d’un biome à l’autre et qui parvient à multiplier les effets visuels de toute beauté sans jamais perdre en fluidité ni en lisibilité. À ce sujet, on retiendra tout particulièrement la mise en scène des différents boss, grandiloquente et épique à souhait. De quoi marquer les esprits si le reste du jeu n’a pas déjà réussi à le faire durant la vingtaine d’heures nécessaire à sa complétion – une donnée qui peut évidemment beaucoup varier d’un joueur à l’autre.

Verdict

Nouvelle licence, nouvelle prise de risque, nouvelle réussite pour Sony qui nous livre avec cette production d’Housemarque une exclusivité comme on n’a pas l’habitude d’en voir au sein de son catalogue. Amenant sous le feu des projecteurs un genre habituellement cantonné aux productions indépendantes, Returnal propose une expérience particulièrement exigeante mais accrocheuse au cœur d’un univers de science-fiction aussi singulier qu’immersif. La difficulté du jeu ne conviendra pas à tout le monde, c’est un fait, mais avec un minimum de persévérance et d’implication, l’aventure est en réalité beaucoup plus accessible qu’elle n’en a l’air. Une belle entrée en matière pour la PS5 donc, qui semble bien partie pour nous réserver de bonnes surprises, tout comme sa grande sœur avant elle.

3 commentaires sur « TEST | Returnal : Un roguelike exigeant mais terriblement immersif »

  1. Comme d’ordinaire, tes tests sont toujours clairs et donnent vraiment une idée du jeu en question ! C’est ce que j’apprécie le plus : tu arrives toujours à mettre des mots qui permettent de visualiser une ambiance, un scénario, une difficulté, se rendre compte du gameplay, de la progression du jeu. Et Returnal était particulièrement cryptique dans ses bandes-annonces. Je comprends en quoi il est exigeant, mais aussi à quel point il doit être plaisant une fois qu’on a compris les mécanismes et qu’on relève le challenge. Je l’avoue, il m’intrigue pas mal ! Et c’est la difficulté qui me rebute, je ne suis parfois pas très patiente. Mais en tout cas l’éditeur a proposé quelque chose d’encore différent dans ses productions, et cette variété est à saluer !

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    1. Je me dois encore une fois de te remercier chaleureusement pour ce superbe compliment. J’essaye toujours de faire en sorte de présenter un jeu sous toutes ses coutures sans spoiler ou trop en révéler pour ne pas gâcher le plaisir de la découverte, et lire tes mots me conforte dans l’idée que je réussis mon objectif. Donc ça me fait extrêmement plaisir ! ☺️

      Je suis ravi, du coup, d’avoir pu t’aiguiller davantage sur ce Returnal. C’est vrai que la campagne marketing est restée très cryptique jusqu’au bout, moi-même je ne savais pas vraiment dans quoi je mettais les pieds au moment de me lancer. D’ailleurs, j’avais un peu d’appréhension. Mais finalement, ça a été une belle surprise.
      Après, il est évident que ce jeu ne plaira pas à tout le monde. Mais ça fait partie du jeu, et comme tu l’as si bien dit : la variété proposée par Sony dans ses productions mérite d’être saluée. Certains reprochaient à l’éditeur de ne proposer presque que des aventures narratives cinématographiques, on a aujourd’hui une nouvelle preuve que ce n’est pas forcément le cas.

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    2. Je te garantis qu’à chaque fois c’est ainsi avec tes tests, on arrive à avoir une claire idée du jeu, du gameplay, de l’ambiance… sans se spoiler… Et c’est effectivement bien rare ! Je ne peux que t’encourager à continuer 🙂

      Oui, finalement l’essentiel est peut-être que ce jeu ait surpris tout le monde, sinon, pas sûr qu’autant de gens lui auraient donné sa chance. Et c’est bien de se laisser totalement surprendre, parfois.

      Aimé par 1 personne

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